samedi 10 novembre 2007

La vitesse, la route, et l'homme

En cent ans les transports on fait des progrès fantastiques, mettant à la disposition du plus grand nombre des vitesses de déplacement élevées, et générant de nouveaux besoins sur les infrastructures (routes, autoroutes, échangeurs, voies ferrées) et une nouvelle série de nuisances (paysagères, sonores).
Deux commentaires en miroir sur ce sujet, le premier de Le Corbusier, où dans Manière de penser l'urbanisme, il nous rappelle à la fois la nouveauté de ce changement et son impact, pour lui de l'ordre de la civilisation:
Le crépuscule d'une civilisation et l'aube d'une nouvelle civilisation ont été marqués par des inventions mécaniques: le régime millénaire des vitesses de "4 km-heure" (pas de l'homme, du cheval, du boeuf) est passé brutalement à celui des 50, 100, voire 500 km-heure pour le transport des personnes et des produits et à celui, illimité, du télégraphe, du téléphone, de la radio pour le transport des idées (information, commandement, ordres et contrôles).
Quelque 50 ans plus tard, dans Si la ville m'était contée, Gilles Rabin et Luc Gwiadzinski nous rappellent l'effet pervers de l'automobile et de cette facilité à se déplacer d'un point à un l'autre très rapidement en complète autonomie:
L'homme de cette fin de XXème Siècle ne voyage plus: il se déplace. Disons plutôt qu'il saut d'un lieu à un autre sans s'investir dans le voyage. Il "zappe" les espaces, passant de l'un à l'autre par des "tunnels". En clair, la route ne fait plus partie du voyage. Elle est devenue un espace-temps subi qui sépare le départ de l'arrivée. L'automobiliste, "handicapé du réel", installé dans sa bulle aseptisée - prolongement de son domicile - emprunte ce "tunnel temporel" avec des oeillères, l'autoradio pour seul compagnon. Notre aventurier du chronomètre n'a qu'une idée en tête: arriver le plus vite possible. La route, comme les autres infrastructures nécessaires à la circulation accélérée des hommes et des biens, n'est plus qu'un "non-lieu" que l'on se dépêche de traverser.
Tout n'est pas perdu, l'homme du XXIème Siècle semble redécouvrir le plaisir de la marche, de la lenteur, de la flânerie. De fait, on voit se dessiner cette double évolution: déplacements rapides pour l'utilitaire et lents pour le plaisir. Aller vite à de Paris à San Francisco, pour le plaisir d'errer dans Lombard Street et sur Market Street.

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